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mercredi 15 août 2012

Les mots - Jean-Paul Sartre

"Il n'y a pas de bon père, c'est la règle; qu'on n'en tienne pas grief aux hommes mais aux lien de paternité qui est pourri. Faire des enfants, rien de mieux; en avoir, quelle iniquité!"

"Ce n'est pas assez que mon naturel soit bon; il faut qu'il soit prophétique: la vérité sort de la bouche des enfants."

"Tous les enfants sont des miroirs de mort."

"Les chiens savent aimer; ils sont plus tendres que les hommes, plus fidèles; ils ont du tact, un instinct sans défaut qui leur permet de reconnaître le Bien, de distinguer les bons des méchants."

"Le Bien naît au plus profond de mon coeur, le Vrai dans les jeunes ténèbres de mon Entendement."

"Je traite les inférieurs en égaux."

"Heureusement , les applaudissements ne manquent pas: qu'ils écoutent mon babillage ou l'Art de la Fugue, les adultes ont le même sourire de dégustation malicieuse et de connivence; cela montre ce que je suis au fond: un bien culturel. La culture m'imprègne et je la rends à la famille par rayonnement, comme les étangs, au soir, rendent la chaleur du jour."

"J'ai commencé ma vie comme je la finirai sans doute: au milieu des livres. Dans le bureau de mon grand-père, il y en avait partout; défense était faite de les épousseter sauf une fois l'an, avant la rentrée d'octobre. Je ne savais pas encore lire que, déjà, je les révérais, ces pierres levées; droites ou perchées, serrées comme des briques sur les rayons de la bibliothèque ou noblement espacées en allées de menhirs, je sentais que la prospérité de notre famille en dépendait. Elles se ressemblaient toutes, je m'ébattais dans un minuscule sanctuaire, entouré de monuments trapus, antiques qui m'avaient vu naître, qui me verraient mourir et dont la permanence me garantissait un avenir aussi calme que le passé. Je les touchais en cachette pour honorer mes mains de leur poussière mais je ne savais trop qu'en faire et j'assistai chaque jour à des cérémonies dont le sens m'échappait: mon grand-père - si maladroit, d'habitude, que ma mère lui boutonnait ses gants - maniait ces objets culturels avec une dextérité d'officiant. Je l'ai vu mille fois se lever d'un air absent, faire le tour de sa table, traverser la pièce en deux enjambées, prendre un volume sans hésiter, sans se donner le temps de choisir, le feuilleter en regagnant son fauteuil, par un mouvement combiné du pouce et de l'index puis, à peine assis, l'ouvrir d'un coup sec "à la bonne page" en le faisant craquer comme un soulier. Quelquefois je m'approchais pour observer ces boîtes qui se fendaient comme des huîtres et je découvrais la nudité de leurs organes intérieurs, des feuilles blêmes et moisies, légèrement boursoufflées, couvertes de veinules noires, qui buvaient l'encre et sentaient le champignon."

"Je ne savais pas encore lire mais j'étais assez snob pour exiger d'avoir mes livres."

"Nos visiteurs prenaient congé, je restais seul, je m'évadais de ce banal cimetière, j'allai rejoindre la vie, la folie des livres. Il me suffisait d'en ouvrir un pour y redécouvrir cette pensée inhumaine, inquiète dont les pompes et les ténèbres passaient mon entendement, qui sautait d'une idée à l'autre, si vite que je lâchai prise, cent fois par page, et la laissai filer, étourdi, perdu."

"J'avais trouvé ma religion: rien ne me parut plus important qu'un livre. La bibliothèque, j'y voyais un temple."

"Je vivais au-dessus de mon âge comme on vit au-dessus de ses moyens."

"De ces magazines et de ces livres j'ai tiré ma fantasmagorie la plus intime: l'optimisme."

"Il y avait des joies simples, triviales: courir, sauter, manger des gâteaux, embrasser la peau douce et parfumée de ma mère; mais j'attachais plus de prix aux plaisirs studieux et mêlés que j'éprouvais dans la compagnie des hommes murs: la répulsion qu'ils m'inspiraient faisaient partie de leur prestige: je confondais la dégoût avec l'esprit de sérieux. J'étais snob."

"J'étais un enfant, ce monstre qu'ils fabriquent avec leurs regrets."

"Je vivais parce que j'avais commencé à vivre."

"La mort brillait par son absence."

"Plus absurde est la vie, moins supportable est la mort."

"Il ne pensait guère à Dieu sauf dans les moments de pointe; sûr de le retrouver à l'heure de la mort, il le tenait à l'écart de  sa vie."

"La langue française l'émerveillait encore, à soixante-dix ans, parce qu'il l'avait apprise difficilement et qu'elle ne lui appartenait pas tout à fait."

"Au cours de mes chevauchées fantastiques, c'était le réalité que je voulais atteindre."

"L'écriture, mon travail noir, ne renvoyait à rien et, du coup, se prenait elle-même pour fin: j'écrivais pour écrire. Je ne le regrette pas: eussé-je été lu, je tentais de plaire, je redevenais merveilleux. Clandestin, je fus vrai."

"La mort était mon vertige parce que je n'aimais pas vivre: c'est ce qui explique la terreur qu'elle m'inspirait."

"Mes os sont de cuir et de carton, ma chair parcheminée sent la colle et le champignon, à travers soixante kilos de papier je me carre, tout à l'aise. Je renais, je deviens enfin tout un homme, pensant, parlant, chantant, tonitruant, qui s'affirme avec l'inertie péremptoire de la matière. On me prend, on m'ouvre, on m'étale sur la table, on me lisse du plat de la main et parfois on me fait craquer. Je me laisse faire et puis tout à coup je fulgure, j'éblouis, je m'impose à distance, mes pouvoirs traversent l'espace et le temps, foudroient les méchants, protègent les bons. Nul ne peut m'oublier ou me passer sous silence: je suis un grand fétiche maniaque et terrible. Ma conscience est en miettes: tant mieux. D'autres consciences m'ont pris en charge. On me lit, je saute aux yeux; on me parle, je suis dans toutes les bouches, langue universelle et singulière; dans les millions de regards je me fais curiosité prospective; pour celui que sait m'aimer, je suis son inquiétude la plus intime mais, s'il veut me toucher, je m'efface et disparais: je n'existe plus nulle part, je suis, enfin! je suis partout: parasite de l'humanité, mes bienfaits la rongent et l'obligent sans cesse à  ressusciter mon absence."

"J'avais choisi d'être rassuré; et c'était bien vrai, au fond, que je me croyais immortel: je m'étais tué d'avance parce que les défunts sont seuls à jouir de l'immortalité."

"Je choisis pour avenir un passé de grand mort et j'essayai de vivre à l'envers. Entre neuf et dix ans, je devins tout à fait posthume."

"Elle s'efforça de prouver que je valais mieux que mes devoirs: j'avais appris à lire tout seul, j'écrivais des romans; à bout d'arguments elle révéla que j'étais né à dix mois: mieux cuit que les autres, plus doré, plus croustillant pour être resté plus longtemps au four."

"On m'enseignait l'Histoire sainte, l'Evangile, le catéchisme sans me donner les moyens de croire."

"Si je range l'impossible Salut au magasin des accessoires, que reste-t-il? Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui."

Les mots - Jean-Paul Sartre

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