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dimanche 10 mars 2013

L'étrange voyage de Monsieur Daldry - Marc Levy

« Une seule fenêtre, mais elle ouvrait sur l’embouchure du Bosphore ; depuis la table où Alice était assise on pouvait voir les grands navires s’engager dans le détroit et, derrière eux, les rives de l’Europe. »

« L’averse tambourinait sur la verrière qui surplombait le lit. »

« La paix n’avait que cinq ans et la plupart des quartiers portaient encore les stigmates des bombardements. »

« Elle attrapa le châle qui pendait au portemanteau, se regarda dans le petit miroir de l’entrée, repose le châle qui la vieillissait, et alla d’un pas décidé frapper à son tour chez M. Daldry. Mains sur les hanches, elle attendit qu’il lui ouvre.
-Dites-moi qu’il y a le feu et que votre hystérie soudaine n’a d’autre raison que de me sauver des flammes, soupira ce dernier d’un air pincé. »

« -Vous vouliez occuper mon appartement ?
-Je voulais en faire mon atelier. Vous êtes la seule dans cette maison à bénéficier d’une verrière. Hélas, vos charmes ont eu les faveurs de notre propriétaire, alors je me contente de la pâle lumière qui traverse mes modestes fenêtres. 
-Je n’ai jamais rencontré notre propriétaire, j’ai loué cet appartement par l’intérmédiaire d’une agence.
-Pouvons-nous en rester là pour ce soir ?
-C’est pour cela que vous me battez froid depuis que je vis ici, monsieur Daldry ? Parce que j’ai obtenu l’atelier que vous désiriez ?
-Mademoiselle Pendelbury, ce qui est froid à l’instant présent, ce sont mes pieds. Les pauvres sont soumis aux courants d’air que notre conversation leur impose. Si vous n’y voyez pas d’inconvénients, je vais me retirer avant de m’enrhumer. Je vous souhaite une agréable nuit, la mienne sera écourtée grâce à vous.
Mr. Daldry referma délicatement sa porte au nez d’Alice. »

« Les lampions ballotés par la brise donnaient à l’immense jetée, en cette nuit d’hiver, l’air d’un étrange paquebot illuminant de tous ses feux une mer qu’il ne prendrait jamais. »

« Ce soir, elle dînerait dans son lit en compagnie d’un bon livre. Une longue nuit et, le lendemain, elle aurait retrouvé sa joie de vivre. »

« Qui peut savoir avant de se lever s’il sera dans de bonnes dispositions ? Se forcer à être heureux, je trouve cela passablement hypocrite. »

« Vous n’imaginez pas à quel point la vie à un carrefour est riche de mille détails. Les uns courent, d’autres cherchent leur chemin. Tous les types de locomotion s’y rencontrent, carrioles, automobiles, motocyclettes, vélos ; piétons, livreurs de bière poussent leurs chariots, femmes et hommes de toutes conditions s’y côtoient, se dérangent, s’ignorent ou se saluent, se bousculent, s’invectivent. Un carrefour est un endroit passionnant ! »

« Cette femme a raison, ce n’est pas parce que quelqu’un vous a quitté qu’il cesse d’exister. »

« On raconte que si l’on soigne un rhume, il ne dure qu’une semaine et que si l’on ne fait rien, il faut sept jours pour en guérir, dit Daldry en ricanant. »

« Je me moque de toi, mais un voyage entre filles, ce serait une sacrée aventure… Il fait chaud en Turquie, les garçons doivent avoir la peau doirée. »

« Daldry se retourna lentement, il avait une mine blafarde, une barbe de trois jours, les paupières cernées, les yeux rouges et humides.
-Ca ne va pas ? demanda Alice, inquiète.
-Si, moi ça va, répondit Daldry, mon père en revanche a eu la fâcheuse idée de ne pas se réveiller lundi dernier. Nous l’avons enterré il y a trois jours. »

« Une photo de la basilique Sainte-Sophie apparaissait en couverture.
Roses ottomanes, fleurs d’oranger, jasmin, rien qu’en feuilletant les pages, elle avait l’impression de distinguer chacun de ces parfums. Elle s’imagina dans les ruelles du grand bazar, chinant parmi les étals d’épices, humant les senteurs délicates du romarin, de safran, de cannelle, et ce rêve eveillé ravivait ses sens. Elle soupira en reposant son dépliant, son thé lui parut soudain bien fade. Elle s’habilla pour aller frapper à la porte de son voisin. Il lui ouvrit en pyjama et robe de chambre, retenant un bâillement. »

« De retour chez elle, Alice n’alluma pas la lumière, elle ôta ses vêtements, se glissa nue sous ses draps et regarda le croissant de lune qui brillait au-dessus de la verrière ; un croissant, se dit-elle, presque semblable à celui qui figurait sur le drapeau de la Turquie. »

« Une turbulence un peu forte fit glisser sa tête sur l’épaule de son voisin. Daldry était tétanisé. »

« La traversé des faubourgs d’Istanbul mit un terme à leur dispute. Daldry et Alice approchaient de la Corne d’Or. Ruelles étroites, maisons aux façades bigarrées étagées en amphithéâtres, tramways et taxi bataillant sur les grandes artères, la ville grouillait de vie et captait toute leur attention.
-C ‘est étrange, dit Alice, nous sommes bien loin de Londres, et cet endroit me semble familier.
-C’est ma compagnie, dit Daldry en taquinant Alice.
Le taxi se rangea dans l’arrondi d’une grande avenue pavée. Le Pera Palas Hotel, noble immeuble en pierre de taille, d’architecture française, dominait la rue Mesrutiyet dans le district de Tepebasi, au cœur du quartier européen.
Six dômes en dalles de verre surplombaient l’immense hall, la décoration intérieure éclectique mariait avec goût boiseries d’Angleterre et mosaïques orientales.
-Agatha Christie avait ici sa chambre attitrée, annonça Daldry.
-Cet endroit est beaucoup trop luxueux, protesta Alice, nous aurions pu nous contenter d’une modeste pension de famille.
-Le taux de change de la livre turque est en notre faveur, rétorqua Daldry, et puis je dois prendre des mesures draconiennes si je veux réussir à gaspiller mon héritage. »

« Can devait avoir trente ans, peut-être une ou deux années de plus. Il portait une tenue élégante, un pantalon noir, une chemise de soie blanche et un gilet sous un veston élégamment coupé. Can avait des yeux couleur d’or et de sable. Le regard vif, dissimulé derrière de petites lunettes rondes. »

« -Ce sont des yalis, dit le guide d’une voix posée, des habitations de villégiature, vestiges de la splendeur de l’Empire ottoman. Elles étaient très appréciées au XIXe siècle. »

« Ils visitèrent le palais de Topkapi, la mosquée Süleymaniye, les tombeaux de Soliman et de Roxelane, se promenèrent des heures durant dans les rues animées autour du pont de Galata, parcoururent les allées du bazar égyptien. Au bazar des épices, Alice s’arrêtait devant chaque étal, humant les poudres, les décoctions de fleurs séchées, les parfums en flacon. Daldry s’extasia sincèrement, et pour la première fois, devant les admirables faïences d’Iznik de la mosquée Rüstem Pasa, puis à nouveau devant les fresques de l’ancienne église Saint-Sauveur. En parcourant les ruelles d’un vieux quartier où mes maisons en bois avaient résisté aux grands incendies, Alice se sentit mal à l’aise et souhaita s’éloigner. Elle fit grimper Daldry en haut de la tour Génoise qu’elle avait visitée sans lui. Mais le plus beau moment fut certainement quand Can l’emmena dans le passage des fleurs et son marché couvert où elle voulut passer la journée entière. Ils déjeunèrent dans l’une des nombreuses guinguettes du coin. Le jeudi, ce fut le tour du quartier de Dolmabahçe, le vendredi celui d’Eyüp, au fond de la Corne d’Or. Après avoir admiré le tombeau du compagnon du Prophète, ils gravirent les marches jusqu’au cimetière et s’accordèrent une pause au café Pierre Loti. Depuis les fenêtres de la vieille maison où l’écrivain venait se reposer, on apercevait par-dessus les pierres des tombes ottomanes le grand horizon que dessinaient les rives du Bosphore. »

« -Cela se trouve où votre bout de la nuit ?
-Au fond de la prochaine bouteille que je vais commander, ou de la suivante, je ne peux encore rien vous promettre. »

« -Parce que voir souffrir ma mère m’a fait comprendre que pour un homme, aimer, c’est cueillir la beauté d’une femme, la mettre sous serre, pour qu’elle s’y sente à l’abri et la chérir… jusqu’à ce que le temps la fane, alors les hommes repartent cueillir d’autres cœurs. »

« Je m ‘amuse chaque fois en pensant que je pars travailler en Europe et que je rentrerai le soir en Asie où je réside. »

« Et, gravissant l’escalier bringuebalant, Alice perçut le parfum de lavande des cantonnières, l’odeur de l’huile de lin qui lustrait la rambarde, des draps amidonnés qui sentaient la farine, et, dans la chambre de Mme Yilmaz, celle de la naphtaline qui sentait la solitude. »

« -Et toi, Rafael, tu n’as jamais eu envie de quitter la Turquie ?
-Pour aller où ? C’est le plus beau pays du monde, et c’est le mien.
-Et pour la mort de nos parents, tu  as pardonné ?
-Il fallait pardonner, tous n’étaient pas complices. Pense à Yaya, à sa famille qui nous ont sauvés. Ceux qui m’ont élevé étaient turcs et m’ont appris la tolérance. Le courage d’un juste répond à l’inhumanité de mille coupables. Regarde par cette fenêtre comme Istanbul est belle. »

« -Depuis quand ? demanda Alice.
Daldry inspira profondément.
-Depuis le premier jour où vous êtes entrée dans cette maison, depuis la première fois où je vous ai vue monter cet escalier, et le trouble n’a cessé d’empirer. »

L’étrange voyage de Monsieur Daldry – Marc Levy